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Naëm Bestandji

Féminisme / Universalisme / Laïcité

dossiers - Compromission et relativisme politique - Maryam Mirzakhani, nike, voile

Nike voile une iranienne décédée, non voilée de son vivant

Par Naëm Bestandji . Publié le 17 Mars 2019 à 14h00

De nombreuses marques et enseignes de vêtements aiment à participer au développement du sexisme et de l'intégrisme religieux quand cela peut rapporter de l'argent (H&M, Gap, Nike, Décathlon et autres). Pour le faire passer auprès du grand public, nul besoin d'engager trop de frais en recherche marketing. Il suffit de s'appuyer sur celui des islamistes pour en reprendre les codes : on évite d'aborder les justifications du voile en les couvrant d'éléments de langage comme "mode pudique" ou tenue "modeste". Cela a le mérite de dicter aux femmes comment se vêtir derrière un vocabulaire soft mais moralisant et infantilisant (si tu veux être une femme bien, pudique et faire preuve de modestie, alors caches-toi sous un voile). En effet, être trop direct n'aurait pas le même effet marketing : "emballage pour sex toy dont la responsabilité est engagée pour tout débordement sexuel masculin en cas de nudité" (montrer ses cheveux, ses bras, son cou ou ses oreilles est considéré comme de la nudité donc de "l'impudeur").

Face aux critiques, ces marques et enseignes savent faire preuve d'un certain aplomb en se justifiant par une fausse tolérance qui n'est que de la condescendance et du mépris : "Nous proposons tout type de vêtements car nous respectons toutes les personnes, toutes les cultures et toutes les religions". Toutes les cultures se valent. Toutes les interprétations religieuses aussi, même si elles sont des créations des intégristes par obsession sexuelle et visée politique… à partir du moment où ça rapporte de l'argent.

Cette motivation pécuniaire, alliée à la volonté de remettre les femmes à leur place en ce qui concerne leur corps, a poussé Nike à se comporter comme les pires des voileurs islamistes :

Maryam Mirzakhani (1977-2017) était une mathématicienne iranienne de renommée mondiale, professeure à l'université Stanford (Californie). Voilée par obligation lorsqu'elle vivait en Iran, puisque de sexe féminin, elle retira son voile dès son premier pas sur le sol américain en 1999. Mais Nike n'en a cure. Comme tous les relativistes qui prônent le "libre choix" du voile, la marque a une vision orientaliste des musulmans qui frôle le racisme : une bonne musulmane, soumise à la libido masculine, est forcément voilée. La marque exhuma alors une image de Maryam Mirzakhani commandée par les services iraniens à l'époque où elle vivait encore en Iran (donc contrainte à se voiler). Cette image lui a servi d'illustration pour louer l'intelligence de cette mathématicienne, première femme à remporter la médaille Fields, dans le cadre de ce que la marque appelle "le mois des femmes dans l'histoire". Le texte met ainsi en avant une volonté féministe, mais recadre ce féminisme par une image qui rappelle l'assignation des femmes : tu peux avoir un emploi, faire carrière, être financièrement autonome, briller par ton intelligence, mais n'oublie jamais que ta valeur ne se mesure pas à tout cela. Elle se mesure à la "pudeur" de ton corps lié à la communauté, à l'excitation sexuelle que tu peux susciter pour les hommes et dont tes cheveux, ton cou et tes oreilles sont responsables. En cela, tu seras toujours inférieure à l'homme en dignité et en droits.
C'est le principe, né aux États-Unis, des racialistes et intersectionnelles.

Nike a une vision orientaliste des musulmans qui frôle le racisme : une bonne musulmane, soumise à la libido masculine, est forcément voilée.

Maryam Mirzakhani, voilée par Nike

Cet épisode, révélé par une féministe iranienne sur Twitter, montre aussi autre chose. Il montre à quel point les relativistes peuvent nier la signification du voile en adoptant la même attitude que les voileurs : peu importe que cette femme refusait d'être voilée, on la voile quand même, au-delà de sa mort.

Indignation au voilement de Maryam Mirzakhani par Nike

Face à la polémique, Nike se réfugie encore derrière sa belle "tolérance" face au "libre choix" du voile : "Nike respecte toutes les personnes, toutes les cultures et toutes les religions, et nous prenons au sérieux les préoccupations de cette nature" (1).

"Je suis Youssef Al-Qaradhawi et j'approuve ce message".

(1) Nike condemned for putting hijab on Iranian mathematician who chose not to wear one






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