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Naëm Bestandji

Féminisme / Universalisme / Laïcité

dossiers - Islamisme politique - Christchurch, attentat, ''islamophobie'', Idriss Sihamedi, CCIF, L-e-s Musulmans

L'attentat à Christchurch, outil tant attendu par les islamistes pour sanctionner les atteintes à l'islam ("islamophobie") 3ème partie

Par Naëm Bestandji . Publié le 03 Avril 2019 à 13h10

Dans la partie pécédente, nous avons vu que le profil des initiateurs de l'"Appel contre une islamophobie grandissante" (1) révèle leur radicalité religieuse, tout comme celle des premiers signataires. Certains démontrent leur ancrage dans l'idéologie des Frères musulmans, d'autres dans le salafisme. La plupart expriment leur racisme intracommunautaire sans complexe, parfois avec une dose d'antisémitisme. D'autres assument leur profond sexisme, leur rejet de la laïcité et leur désir de sécession avec la République. D'autres encore n'hésitent pas à comparer l'homosexualité à l'inceste et à la pédophilie, à s'associer avec des intégristes catholiques pour lutter contre le mariage pour tous et le droit à l'IVG. Certains sont fichés S.

Cette nébuleuse dénonce "l'islamophobie", terme brandi pour confondre volontairement la peur de l'islam (qu'ils suscitent eux-mêmes) et sa critique, avec les actes et propos anti musulmans. Ceci pour tenter de rétablir le délit de blasphème afin de faciliter l'avancée de l'islamisme, au nom des "valeurs censées nous unir", comme il est écrit dans leur appel pour bien jouer sur la fibre républicaine des lecteurs.

Idriss Sihamedi, le salafiste fiché S qui refuse de serrer la main des femmes

La liste des signataires sulfureux est encore longue. Je n'en aborderai que quelques autres. L'un d'entre eux est le salafiste Idriss Sihamedi. Il s'était rendu célèbre en refusant de serrer la main de Najat Vallaud Belkacem, à l'époque ministre, car elle est une femme. Il est le président de l'association Baraka City, une ONG fondée par des salafistes et surveillée par les services de renseignements (2). Les locaux de l'association avaient d'ailleurs été perquisitionnés à plusieurs reprises entre 2015 et 2017 dans le cadre d'une enquête sur des soupçons de financement du terrorisme (3). Idriss Sihamedi, président de cette ONG, est lui-même fiché S depuis plusieurs années (4).

Idriss Sihamedi, fiché S

Le lendemain de l'attentat en Nouvelle Zélande, par un tweet, il n'hésita pas à instrumentaliser le massacre pour violemment menacer des personnes politiques et des médias français. Il insulte l'islam mais fait plaisir aux djihadistes en terminant son tweet par un appel à Dieu en arabe (traduction : "si Dieu le veut"). Quelques jours plus tard, il signa évidemment l'appel contre "l'islamophobie"…

Idriss Sihamedi, fiché S, menace des politiques et des médias

Idriss Sihamedi instrumentalise l'attentat en Nouvelle Zélande pour violemment menacer des médias et des politiques. Il insulte l'islam mais fait plaisir aux djihadistes en terminant son tweet par un appel à Dieu en arabe (inchallah).

Le 30 novembre 2015, Idriss Sihamedi, le CCIF et Al Kanz (cf. partie précédente) s'étaient déjà associés pour signer un "message commun". Deux semaines après les attentats de novembre 2015, et 4 jours après la première perquisition des locaux de Baraka City, leur texte victimaire à outrance fut publié sur le site du CCIF qui expliquait à quel point les perquisitions dans les milieux islamistes seraient "islamophobes" (5)…

Message commun du CCIF, Barakacity, Al-Kanz, Nabil Ennasri et Marwan Muhammad

L'ensemble des islamistes politiques ont toujours adopté cette rhétorique : condamner les attentats djihadistes en une ou deux phrases, pour la forme, et s'en servir de levier pour dérouler toute leur logorrhée victimaire dont le terme "islamophobie" sert de glaive verbal. Alors un attentat commis par un militant de l'autre extrême droite contre des musulmans est, pour eux, le top du top de la victimisation. Même si le drame s'est déroulé à 20 000 km de chez nous. C'est pour cela que le CCIF fut l'un des premiers signataires de l'"Appel contre une islamophobie grandissante".

Le CCIF fut un des premiers signataires de l'"Appel contre une islamophobie grandissante"

Le CCIF est une association d'extrême droite, idéologiquement la branche juridique des Frères Musulmans en France. Il n'hésite donc pas à s'afficher et à revendiquer le soutien de prédicateurs salafistes et Frères Musulmans antisémites, homophobes et ultra sexistes. D'un autre côté, aucun musulman rationaliste ne soutient ou n'est soutenu par le CCIF. Cette association milite pour un islam ultra identitaire et suprématiste. Pour cela, elle racialise les musulmans et en fait des persécutés (y compris les islamistes) car, selon elle, Dieu aurait fait d'eux "la meilleure des communautés", "les premiers de la classe" sur l'échelle humaine, pour diriger le monde. Sa méthode favorite est donc la victimisation. Le voile est bien entendu l'accessoire principal de sa propagande.

Le CCIF affiche et revendique le soutien de prédicateurs salafistes et Frères Musulmans antisémites, homophobes et ultra sexistes. D'un autre côté, aucun musulman rationaliste ne soutient ou n'est soutenu par le CCIF.

Dans la droite ligne de la stratégie politique frériste en France, le CCIF prétend être antiraciste, défendre les droits humains et combattre "l’islamophobie". Un terme qui se retrouve jusque dans la dénomination de cette association. Sa quête est de lutter contre toute critique de l'islam, et surtout de l'islamisme, pour faire avancer son idéologie politico-religieuse. Un de ses moyens est de cliver la société. Pour cela, elle tente de créer une fracture identitaire entre les français musulmans et le reste de la société, et en suscitant la peur de l'islam (islamophobie) chez les autres citoyens. Elle divise alors les individus entre "eux" (les "français") et "nous" (les musulmans). Comme tous les islamistes, elle justifie ce clivage auprès de son public en diabolisant le "mode de vie tel qu'il est pratiqué ici" (en France) et en valorisant l'islam transformé en identité pour se protéger du mode de vie français qui serait dépravé. Pour illustrer son propos, il reprend un exemple qui circule depuis des années dans les milieux islamistes : la femme française qui se mettrait nue pour vendre du yaourt (6). Bref, cette association est le fleuron de la nouvelle extrême droite française, le pendant islamiste de "Génération identitaire", à qui j'avais consacré un long article en 5 parties (7).

Le CCIF est le collectif islamiste qui pousse la stratégie victimaire à son paroxysme. Ainsi, il peut désigner tout et n'importe quoi comme étant "islamophobe". En avril 2011 par exemple, Marwan Muhammad, alors porte-parole du CCIF, exprima son indignation face au "viol des femmes le jour de l’Aïd". Ces violeurs "islamophobes" pourraient attendre le lendemain, par respect pour l'islam… Dans son propos, si le viol a lieu le jour de l’Aïd, ce n’est plus un crime commis sur une femme mais un acte "islamophobe" contre une musulmane. Marwan Muhammad, ultra identitaire islamiste, est l'un des signataires de l'appel contre "l'islamophobie".

En juin 2011, lors d'un meeting pour les primaires socialistes de Ségolène Royal à Montpellier, des militants politiques, dont des femmes voilées, avaient perturbé son discours par des cris. Ils lui reprochaient, entre autres, sa position contre l'excision, contre le sexisme du voile et d'apporter son "soutien à Israël au détriment de la Palestine", selon eux. Elle déclara peu après devant les journalistes que les "intégristes n'ont pas leur place dans la République française s'ils se comportent comme cela" (8). Sa déclaration n'exprime en rien une peur de l'islam (islamophobie) et est encore moins anti musulmane. Elle pointait du doigt la perturbation politique de ces militant(e)s dont certaines revendications relèvent de celles habituelles des islamistes et dont les perturbatrices portaient sur leur tête le symbole féminin des Frères musulmans : le hijab. Mais dans son rapport 2012, le CCIF inclut cet événement dans ses statistiques comme propos "islamophobe"…

Plus proche de nous, en décembre 2016, un drame eut lieu, comme il en arrive malheureusement tous les jours : un chauffard renversa deux femmes et une fillette à Armentières. Le CCIF s’était alors saisi de l’affaire. Pourquoi une telle frénésie pour un délit routier ? A-t-il soudain inclus dans ses actions les problèmes liés à la défense des victimes de la route ? Pas du tout. C’était seulement parce que les deux femmes étaient voilées. Ceci ne pouvait donc être, selon l'association, qu'un acte "islamophobe"… Cela aurait pu être risible s’il n’y avait pas eu de victimes.

Absolument rien ne permettait une telle affirmation. Le CCIF ne prit aucun recul, aucune précaution avant d’avancer ce genre de théorie. Pourtant, comme toujours dans ses dérives populistes, il s’était enflammé et n’hésita pas à faire une description détaillée de la scène de la façon la plus émouvante possible, et assura qu’il accompagnera les victimes jusqu’au bout. Là encore, un délit se transforme en acte "islamophobe" parce que des musulmans sont concernés. Quel manque de respect de la part de ce chauffard ! Si elles n’avaient pas été musulmanes, voire même si elles avaient été musulmanes mais non voilées, le CCIF n’y aurait pas jeté le moindre regard et n'aurait pas été aussi larmoyant.

Évidemment, les premiers éléments de l’enquête avaient bien montré que c’était uniquement un délit routier avec délit de fuite (9). La justice confirma cette évidence en janvier 2018 et rejeta tout soupçon d'acte anti musulman (seuls les actes et propos anti musulmans sont condamnables par la loi. L'islamophobie n'est pas un délit, contrairement à ce qu'affirme la propagande du CCIF).

Force est de reconnaître au CCIF une grande capacité d'imagination pour transformer des délits ou crimes, qui n'ont rien à voir avec l'islam, en actes "islamophobes". Du viol le jour de l'Aïd au délit routier en passant par Ségolène Royal, le CCIF inclut tout cela dans ses "statistiques", comme on peut le voir dans ses "rapports annuels sur l’islamophobie en France". Les actes réellement anti-musulmans qui y sont aussi répertoriés (qui existent et qu'il faut punir) côtoient ainsi des situations purement fantaisistes ou infondées. Par l'analyse de ces quelques cas qui ne sont qu'un échantillon, nous pouvons constater le manque de rigueur et le parti pris idéologique pour déclarer tout et n'importe quoi en acte ou propos "islamophobe". Ceci jette un énorme doute sur une bonne part des autres éléments répertoriés où rien ne permet d'en vérifier la fiabilité. Seule la parole du CCIF fait office de "preuve". Parole dont on peut constater le manque de crédibilité.

Dans ces conditions, face au peu de sérieux de ces fausses statistiques, les rapports du CCIF depuis 2013 ne fournissent plus la liste détaillée des "actes islamophobes". On se demande bien pourquoi…

Ainsi, l'attentat de Christchurch étant réellement un acte anti musulmans, l'occasion est trop belle pour le CCIF. Même si cet attentat a eu lieu à 20 000 km de la France.

Le responsable de l'antenne du CCIF dans le Nord-Pas-De-Calais qui qualifia le délit routier d'acte "islamophobe" est Jawad Bachare. Il est l'actuel directeur du CCIF. Il est l'un des signataires de cet appel contre "l'islamophobie".

Si le CCIF dénonce la responsabilité de l'extrême droite française, et tous les "discours "islamophobes" à droite comme à gauche", dans l'attentat en Nouvelle Zélande, que dire de son attitude et de ses propos choquants concernant Charlie Hebdo depuis 2011 ? (10) Que dire des propos de son porte-parole de l'époque, Marwan Muhammad ?

Voici ce qu'il disait, le 30 avril 2011, à propos des journalistes et journaux "islamophobes".

Sa conclusion est bien celle-ci : Ça doit coûter cher dans ce pays de salir la dignité des musulmans (il le répète 2 fois). Lors de cette même conférence, il martela également sur un ton très ferme que les islamophobes, les gens qui vous veulent du mal, les gens qui veulent nous causer du tort, à nous en tant que musulmans, ils ne méritent pas une seule de vos larmes. Quand je dis "pas une seule", pas une seule de vos larmes ! Pas une seconde de votre tristesse, pas une seule.

Six mois plus tard, les locaux de Charlie Hebdo avaient été incendiés. Moins de 4 ans après, la rédaction a été massacrée… Et comme promis, Marwan Muhammad ne versa pas la moindre larme.

Tweet de Marwan Muhammad sur Charlie Hebdo, 11 janvier 2015

Extrait du texte de Marwan Muhammad publié le 12 janvier 2015

Extrait du texte de Marwan Muhammad publié sur sa page Facebook le 12 janvier 2015, 5 jours après le massacre et lendemain de la manifestation nationale "Je suis Charlie".

Si le CCIF considère que toute critique de l'islam(isme) mène au terrorisme (dont la France porterait la responsabilité pour celui commis en Nouvelle Zélande), ne pourrions-nous pas dire qu'il a aussi sa part de responsabilité dans les attentats que nous avons subis sur notre sol, là où il tient justement ce type de discours ? Si cette association souhaite faire ce genre de raccourcis pour tenter de faire taire toute critique de son idéologie, elle doit accepter qu'on use de ce même raccourci la concernant.

Si le CCIF dénonce la responsabilité de l'extrême droite française, et tous les "discours "islamophobes" à droite comme à gauche", dans l'attentat en Nouvelle Zélande, que dire de son attitude et de ses propos choquants concernant Charlie Hebdo depuis 2011 ?

"L.e.s Musulmans", plateforme islamiste dérivée du CCIF, a aussi signé l'appel

La plateforme "L.e.s Musulmans", autre signataire de l'appel contre "l'islamophobie", est une sorte d'émanation du CCIF. Comme chez Islam&info (cf partie précédente), le "M" de "Musulman" est en majuscule pour signifier que l'islam ne serait pas un choix religieux, que ses fidèles essentialisés formeraient un peuple, une ethnie qui devrait se distinguer du reste de la société. Cette "plateforme collaborative" s'est construite autour de la pseudo consultation des musulmans lancée par Marwan Muhammad (ex directeur du CCIF) il y a quelques mois. Comme nous l'avons vu, ce militant religieux d'extrême droite a une vision raciste et suprématiste de sa religion, et a une conception rétrograde et identitaire de la femme musulmane. Mais lorsqu'il s'adresse au grand public, son discours se veut rassembleur et consensuel afin de rassurer et séduire (même s'il a souvent du mal à retenir sa radicalité et son désir de cliver). Sa "consultation des musulmans" et la création de cette plateforme, qui en était l'objectif, font partie de la vitrine destinée à séduire et à rassembler tous les musulmans "dans toute leur diversité" selon lui.

Le problème est qu'il n'hésite pas à pratiquer ce qu'il prétend combattre. En effet, il considère les musulmans progressistes comme des "néo harkis" (des traîtres à leur "communauté") et nomme l'islam des Lumières "l'islam du réverbère", terme exprimé pour souligner son mépris face à une approche religieuse qui serait insignifiante.

Marwan Muhammad et l’ensemble des islamistes ont horreur de cette Lumière. Ce qui explique en partie la naissance des Frères musulmans. Pour eux, elle aveuglerait les musulmans. L’obscurantisme serait le seul chemin pour respecter l’islam. La violence de la phrase de M. Muhammad, à la fois sur le fond et dans le ton, illustre la dureté du combat qui existe au sein de l’islam aujourd’hui. A ce jour, c’est l’intégrisme musulman qui domine. Mais les musulmans rationalistes, même s’ils sont inaudibles pour l’instant, n’ont pas dit leur dernier mot. Ce qui énerve énormément Marwan, comme on peut le voir sur cette vidéo.

Ses propos sont, selon la définition du CCIF, purement "islamophobes". Mais lui en a apparemment le droit. Il y aurait la bonne et la mauvaise "islamophobie"… Voilà comment développer la peur de l’islam et les amalgames tout en prétendant combattre "l’islamophobie". Cela doit être ça, le fameux "vivre ensemble" du CCIF.

Ce qu’il dit des musulmans qui n'adhèrent pas à sa radicalité, ses propos méprisants et discriminants, et même de rejet, font du CCIF (puisqu'il s'exprimait au nom de cette association), selon ses propres critères, l’association française la plus "islamophobe" que le pays ait jamais connue.

Ce populiste se rêve en leader tout en prétendant le contraire. Mais son rejet d'une frange de l'islam et des musulmans, et le fait qu'il n'a jamais été soutenu par des figures musulmanes progressistes, font que sa "diversité" n'est pas la définition du dictionnaire. Elle signifie d'accepter dans un même mouvement les Frères Musulmans, les salafistes, l'ensemble des ultras identitaires musulmans qui ont pour ambition de se servir de leur citoyenneté pour imposer progressivement leur islamité à la société. Les autres musulmans, citoyens qui ne font pas commerce de leur islamité et ne réduisent pas leur identité à leur religion, n'ont aucune envie d'être associés de près ou de loin à cette plateforme nommée "L.e.s Musulmans".

Sa volonté de "rassembler tous les musulmans" est aussi là pour exclure et réduire à néant les structures actuelles telles que le CFCM (qui ont effectivement montré leur inefficacité). En se nommant "L.e.s Musulmans", cette plateforme assume clairement son désir d'OPA sur l'islam en France. Mais pour cela, il faudra qu'elle se mette d'accord avec d'autres Frères Musulmans dont la motivation politique est toute aussi vivace : l'UOIF, renommée "musulmans de France", dans le même désir d'OPA mais en perte de vitesse.

Nader Abou Anas, le salafiste 2.0 signataire de l'"appel contre l'islamophobie"

Le prédicateur salafiste Nader Abou Anas est un bon exemple de cette "diversité" annoncée par la plateforme. Cet islamiste a rejoint "L.e.s Musulmans" et il le fait largement savoir sur les réseaux sociaux. La plateforme est aussi fière de son arrivée, le met bien en avant sur son site internet, et le considère comme "un soutien de taille".

La plateforme "L.e.s Musulmans" est fier d'accueillir le salafiste Nader Abou Anas.

Qui est ce prédicateur ?
Figure des prêches sur internet, il est le salafiste français 2.0 le plus célèbre. Il est l’administrateur du site Dourous.net dont le slogan est "une étincelle de science sur le net". En réalité, il n'y a pas la moindre étincelle de science sur ce site. La science dont il est question est son interprétation de la Révélation. Comme tous bons intégristes, les salafistes estiment que leur vision est un fait avéré. Leur croyance est donc considérée comme une science.

Ce prédicateur salafiste s'inscrit dans la lignée de ceux qu'il considère comme ses mentors : les salafistes Hassan Bounamcha (prédicateur salafiste ultra sexiste et homophobe, soutien officiel du CCIF) et le "Cheikh Ayoub". Ce dernier est le fondateur d'une "madrassa" (école coranique) salafiste à Paris. Son site internet arbore sans complexe la photo d’une fillette voilée, pour donner le ton. Les enseignements sont destinés aux enfants comme aux adultes. La mixité y est très limitée, voire inexistante, pour "respecter les règles de bienséance islamique" selon eux.

En fidèle disciple, Nader Abou Anas considère la femme comme un objet, mais pas n'importe lequel : un objet sexuel qui devrait être caché derrière un voile. Selon lui, "la musulmane n’a pas à vivre comme elle veut. Mais plutôt comme Allah le veut". Pour faire passer la pilule, il présente cet objet comme un "bijou, un trésor, une perle précieuse" à préserver du regard des hommes qui seraient des "loups" (11). Rhétorique typique des islamistes pour amener les musulmanes à faire le "libre choix" du port du voile. Comme tous ces collègues, il considère que ce n'est pas aux hommes (et aux femmes qui cautionnent le port du voile) d'être éduqués mais aux femmes d'être condamnées à être bâchées. L'intégralité des prescripteurs du voile avancent ces arguments dont le spirituel est totalement absent. C'est normal : l'obligation du voile a été créée par les islamistes. La religion n'est qu'un prétexte pour apaiser leur obsession sexuelle.

Nader Abou Anas est un soutien indéfectible de Marwan Muhammad et du CCIF. Marwan Muhammad, qui le considère comme un simple musulman, le lui rend bien. Le soutien apporté par le prédicateur salafiste à la plateforme "L.e.s Musulmans", et sa fière mise en avant par cette dernière, coulent donc de source.

Il n'y a ainsi rien de surprenant à ce que Nader Abou Anas soit aussi signataire de la tribune contre "l'islamophobie", pour les "valeurs censées nous unir"…

C'est dans ce contexte que certains des plus importants représentants de l'extrême droite musulmane en France se sont associés pour écrire cette tribune.

Le relativisme de personnalités non musulmanes et d'une partie de la presse

Des personnes certainement de bonne foi ont accepté de signer ce texte. Elles ne sont pas des personnalités de premier plan. Mais cela permet d'apporter une crédibilité à cet appel et de dédiaboliser ses auteurs. Ces signataires issus du monde du spectacle, du journalisme et de la politique ne savaient peut-être pas à côté de qui ils ont signé. Ce n'est pas une excuse. Ils auraient dû prendre leurs précautions et vérifier le pedigree de ceux qui leur ont proposé cet appel.

C'est comme ça qu'on devient, parfois malgré soi, ce qu'on nomme un "idiot utile" de l'islamisme. Hapsatou Sy (animatrice de télévision), le Comte de Bouderbala (humoriste) ou, pire encore, la sénatrice UDI Nathalie Goulet sont les faire-valoir de cet appel pour le faire sortir de la sphère islamiste. Présidente de la commission d’enquête sur les réseaux djihadistes, la signature de Nathalie Goulet aux côtés des islamistes et des Indigènes de la République est là pour leur apporter une crédibilité politique et toujours mieux faire avancer l'idée qu'il faudrait rétablir le délit de blasphème. Mais cette signature n'est pas passée inaperçue. Face au tollé sur les réseaux sociaux, puis à sa divulgation dans la presse, la sénatrice l'a finalement retirée.

Mais cet appel a néanmoins fait le tour d'une partie des médias qui, sans recul, l'ont présentée comme une tribune de simples musulmans. Comme il arrive très souvent sur ce sujet, nombre de journalistes abdiquent tout esprit critique et refusent, par paresse intellectuelle ou naïveté, de se renseigner sur les acteurs dont ils parlent et l'enjeu des termes utilisés, comme "islamophobie". Ainsi, l'article du journal Ouest France a pour titre "Islamophobie. Des musulmans réclament des « actes forts » à Emmanuel Macron". Les islamistes sont qualifiés de simples "musulmans". Le terme "islamophobie" est validé par le journal (12). Pire, l'article commence par "Des institutions musulmanes, des responsables et militants associatifs (…)". Ces institutions auraient été instituées par qui ? De quelles associations et militants parle-t-il ? Voilà comment devenir une caisse de résonance de l'islamisme politique, participer à sa dédiabolisation et à sa reconnaissance comme représentant de tous les musulmans. Voilà aussi comment participer, par petites touches, au rétablissement progressif du délit de blasphème par la validation du terme "islamophobie".

Marwan Muhammad : exemple type de l'islamiste qui lutte contre le blasphème ("islamophobie")

Comme nous l'avons vu, par le concept d'"l'islamophobie" les islamistes entretiennent volontairement le flou entre critique de l'islam, de l'islamisme, et actes/propos anti musulmans. L’intérêt est de délictualiser les critiques suscitées par la peur de l'islam (véritable sens du terme "islamophobie") et de l'islamisme, mais aussi toute autre critique du dogme, par le rétablissement du délit de blasphème confondu avec les actes/propos anti musulmans qui eux sont condamnables et doivent être condamnés. Marwan Muhammad a déjà eu l'occasion de montrer cette volontaire confusion. Comme il souhaite renvoyer l'image d'un militant "antiraciste" qui respecterait la liberté d'expression, il déclare n'avoir aucun problème avec la critique de l'islam. Seule la lutte contre la haine envers les musulmans le motiverait. Mais, comme toujours, il hurle à l'islamophobie dès que pointe la critique de l'islam. Ce fut le cas sur le plateau d'iTélé (devenue depuis CNews), le 8 juin 2014 (vidéo ci-dessous). Le journaliste cite Éric Zemmour qui avait déclaré : "il suffit d'ouvrir le Coran pour voir des appels aux meurtres des Juifs et des chrétiens".

La 1ère partie de la vidéo, où Marwan Muhammad prétend être pour la libre critique de l'islam, date de juin 2016. Il contredit ses propres déclarations. Par exemple, il s’insurgea 2 ans auparavant contre une critique du Coran (2ème partie de la vidéo). Un double langage typique des Frères musulmans.

Les idées défendues par Éric Zemmour sont souvent hautement contestables, voire juridiquement condamnables. Il a d'ailleurs déjà été condamné. Mais lorsqu'il critique le Coran en s'appuyant sur ses versets, il ne fait qu'exercer sa liberté de critiquer une idéologie, que nous soyons d'accord ou pas avec son analyse. Son affirmation est textuellement exacte : nous pouvons trouver ce genre d'appels dans le Coran. Mais leur analyse relativise son affirmation. Sa critique est islamophobe, dans le véritable sens du terme (peur de l'islam) et relève du débat intellectuel. Marwan Muhammad sait que ce que dit Éric Zemmour est en partie vrai. Mais il n'y répond pas. Celui qui se prétend pour la liberté d'expression esquive le sujet préférant s'offusquer. Il trouve inacceptable que, sur une antenne comme celle d'iTélé, on tienne ce genre de propos et que, à l'heure où je vous parle, il n'ait pas été encore sanctionné. C'est absolument irresponsable de la part d'une chaîne d'information de donner la parole à des gens qui tiennent ce genre de discours (…) et de ne pas les sanctionner. Et ça, c'est hautement plus problématique qu'une parole islamophobe marginale.

Marwan Muhammad classe cette libre critique du Coran dans la même catégorie que les actes/propos anti musulmans qu'il appelle aussi "islamophobie". Tout devrait être répréhensible. C'est tout l'intérêt de "l'islamophobie", terme volontairement valise. Il assume clairement vouloir appliquer la censure en brandissant le blasphème. En résumé, il déclare n'avoir aucun problème avec la critique de cette religion, sauf quand on la critique. Voilà pourquoi ces islamistes restent vagues dans l'énoncé des principes, pour rassurer la société. Mais dès qu'une situation concrète se présente, l'intégrisme de ces islamistes se révèle, le sens réel du terme "islamophobie" aussi.

Ex directeur du CCIF, Marwan Muhammad est actuellement à la tête de la plateforme "L.e.s Musulmans". Cette plateforme est aussi représentée à la marge par d'autres Frères Musulmans comme Feiza Ben Mohamed (elle aussi signataire de l'appel contre "l'islamophobie") et Samy Debah (ex militant du Tabligh, fondateur et ex président du CCIF). Les deux structures ont donc naturellement officialisé leur rapprochement le 30 octobre 2018. C'est le moyen de créer une synergie islamiste pour être à la fois plus englobant et complémentaire.

Le CCIF et la plateforme "L.e.s Musulmans" ont  officialisés leur rapprochement le 30 octobre 2018.

Leur communiqué commun suite à l'attentat de Christchurch en est l'une des concrétisations.

Le communiqué commun du CCIF et "L.e.s Musulmans" contre "l'islamophobie"

En effet, en plus de leurs signatures pour l'appel contre "l'islamophobie", le CCIF et la plateforme "L.e.s Musulmans" ont aussi publié leur propre communiqué commun (13). Il reprend le même discours que l'autre appel pour valider le terme "islamophobie". Il s'appuie en plus sur les fausses statistiques du CCIF et profite du traumatisme de l'attentat pour tenter un nouveau coup de force : faire du CCIF un partenaire officiel de l'État (dont il combat pourtant les valeurs) par la signature d'"une convention cadre avec le CCIF afin de développer un plan de lutte contre l’islamophobie et une pénalisation des discours islamophobes sur Internet". C'est une nouvelle étape dans la stratégie politique des Frères musulmans pour tenter de rétablir le délit de blasphème et de délictualiser toute expression d'opposition à leur intégrisme. C'est aussi un pas supplémentaire dans le projet du CCIF, et de la plateforme "L.e.s Musulmans", pour devenir les interlocuteurs privilégiés de l'État et les représentants de tous les musulmans.

Ainsi, ces islamistes qui se mobilisent contre "l'islamophobie" ont la volonté de diffuser une version extrémiste de l'islam. Ils veulent amener tous les musulmans vers leur radicalité et prétendre ensuite les représenter. Pour cela, ils veulent cliver la société, faire peur aux citoyens. Ils montrent une image effrayante de l'islam dont leurs référents idéologiques sont racistes, antisémites, ultra sexistes et homophobes. Ils sont les créateurs et les premiers promoteurs de cette peur (l'islamophobie). Une peur qu'ils tentent depuis des années de définir en racisme. L'appel abordé dans cet article, et l'initiative du CCIF et de "L.e.s musulmans", sont les dernières actions en date de cette stratégie qui pousse la société française vers le communautarisme, terreau plus fertile au développement de l'islamisme. Voilà ce que ces islamistes appellent le "vivre ensemble" et les "valeurs censées nous unir", dans leur instrumentalisation classique de ces termes. C'est leur méthode pour tenter de jouer sur la corde sensible des citoyens, des élus et de l'État.

Ces islamistes qui se mobilisent contre "l'islamophobie" ont la volonté de diffuser une version extrémiste de l'islam. Ils veulent amener tous les musulmans vers leur radicalité et prétendre ensuite les représenter.

Ces initiatives pour exprimer l'indignation des islamistes au nom de tous les musulmans illustrent une nouvelle fois le problème que connaît l'islam sunnite par l'absence d'une autorité cléricale. La religion, comme la nature, a horreur du vide. Cette absence de représentation officielle est naturellement comblée par ceux qui s'organisent, motivés par leur fanatisme, et parlent le plus fort : les islamistes.

Le danger que représente l'islamisme politique, grâce notamment au soutien que ses militants ont pu obtenir d'une partie de la gauche, est donc bien plus grand à long terme que n'importe quel attentat.

Celui commis à Christchurch, comme tout autre attentat, est monstrueux et inhumain. Ne laissons pas le projet de chaos des terroristes se réaliser. Ne cédons jamais à leurs intimidations, ni aux culpabilisations victimaires des islamistes politiques et de leurs alliés, ni au repli identitaire (quel que soit le bord). Tuer des musulmans, des juifs, des chrétiens, des athées ou autres, en raison de leur (non) croyance, c'est tuer un peu plus notre civilisation. Vouloir délictualiser la critique de l'islam en surfant sur le sang des victimes aussi.

L'attentat en Nouvelle Zélande, outil tant attendu par les islamistes pour tenter de sanctionner les atteintes à l'islam ("islamophobie"). 1ère partie

L'attentat en Nouvelle Zélande, outil tant attendu par les islamistes pour tenter de sanctionner les atteintes à l'islam ("islamophobie"). 2ème partie

(1) [Tribune] Appel contre une islamophobie grandissante
(2) BarakaCity : plongée au coeur d'une association controversée
(3) Paris: Perquisitions dans les locaux de Baraka City, l'ONG musulmane controversée
(4) BarakaCity : qui est Idriss Sihamedi, l'homme qui a suscité le malaise de Najat Vallaud-Belkacem dans "Le Supplément" ?
(5) MESSAGE COMMUN DU CCIF, DE BARAKACITY, D’ AL-KANZ, DE NABIL ENNASRI ET DE MARWAN MUHAMMAD
(6) La nudité pour un yaourt ou le voile pour la "pudeur" : la femme selon le CCIF
(7) Le CCIF, fleuron de la nouvelle extrême droite française (2ème partie)
(8) Ségolène Royal chahutée par des intégristes
(9) Des musulmanes renversées dans le Nord soupçonnent un acte islamophobe
(10) "Je ne suis pas Charlie. Je suis CCIF", l’intégriste anonyme
(11) Nader Abou Anas - Le vêtement de la femme
(12) Islamophobie. Des musulmans réclament des « actes forts » à Emmanuel Macron
(13) Appel au Ministre de l’Intérieur pour la sécurisation des lieux de culte musulmans

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