Le journal Libération aime soutenir depuis quelques temps les militants de l'islamisme politique et leurs alliés, devenant ainsi partie prenante au profit de l'intégrisme religieux.
Sa dernière prise de position est la publication d'une tribune en soutien à l'association d'inspiration islamiste Lallab (1). Elle fait suite à un article complaisant du journal sur Lallab quelques jours auparavant qui présente l'association comme victime de la fachosphère (2).
Cette tribune désire ainsi rétablir des faits et des vérités qui auraient terni "l'excellent travail" de cette association. Soit. Alors prenons les faits.
Le titre de la tribune tout d'abord (Stop au cyberharcèlement islamophobe contre l'association Lallab) : le terme "islamophobie", qui signifie la peur, la crainte de l'islam, est encore ici utilisé pour définir le rejet d'individus en raison de leur religion. Ce terme popularisé par les islamistes, dans leur stratégie victimaire pour tenter d'empêcher toute opposition à leur radicalité, est validé aujourd'hui par une partie de la société comme étant un synonyme de racisme. Libération participe ainsi au rétablissement progressif du délit de blasphème et au refus de toute réflexion et débat intellectuel sous peine d'être accusé de racisme. Les islamistes ont, pour l'instant, en partie remporté cette bataille.
Lallab a effectivement essuyé des attaques de l'extrême droite traditionnelle. Si les menaces de mort ou la mise en danger des individus est avérée, j'en suis profondément choqué. Rien ne peut les justifier. Des tweets de la fachosphère plus haineux les uns que les autres ont été publiés parmi ceux des militants laïques et féministes qui exprimaient leur indignation. Ces tweets de la fachosphère ressemblent trait pour trait à ceux que nous recevons également de sa part, en y ajoutant ceux des islamistes. Car nous, les féministes universalistes et militants laïques, sommes les adversaires de ces deux extrêmes droites (FN et consort, et islamiste). Un combat que des journaux comme Libération ont décidé d'abandonner par complaisance envers l'islamisme politique. A un tel point qu'ils vont jusqu'à déclarer que les intégristes sont victimes de calomnies en provenance de la fachosphère. Ils adoptent la stratégie islamiste qui est de mettre tout le monde dans le même sac. Des militants qui luttent depuis des décennies contre le FN et le racisme sont volontairement confondus avec les militants d'extrême droite. Toute opposition à l'intégrisme musulman peut ainsi être accusée de fascisme et de racisme. Ceci est bien la preuve que l'extrême droite musulmane a besoin de l'extrême droite traditionnelle dans sa lutte contre l'universalisme et la laïcité, avec le soutien de Libération...
Toute opposition à l'intégrisme musulman peut être accusée de fascisme et de racisme.
Le côté surréaliste de la chose est que les musulman(e)s, militantes féministes ou simples citoyenn(e)s, luttant contre les intégristes sont donc qualifiés "d'islamophobes" et classés dans la fachosphère. Le refus de l'islam version extrémiste est aujourd'hui perçu comme un rejet de l'islam tout court par une partie de la gauche.
Cette complaisance relève de la paresse intellectuelle. La déontologie voudrait qu'un journaliste aille voir au-delà des discours et de l'affichage médiatique. Libération, ou Médiapart, savent très bien le faire lorsqu'il s'agit de nos politiciens ou des milieux économiques. Mais lorsqu'il s'agit de l'islamisme politique, tout change. Cette tribune et l'article de ces derniers jours en sont une belle démonstration.
Il suffit que Lallab déclare être "areligieuse, aconfessionnelle et apartisane dont le rêve est qu’aucune femme ne soit plus jugée, discriminée ou violentée en raison de son genre, de son physique, de son orientation sexuelle, de ses origines ou encore de ses convictions religieuses", pour qu'on la croit. Comme le CCIF, il lui suffit d'utiliser les termes chers à notre République pour que la séduction opère et désamorce toute envie de vérifier si leur idéologie et leurs actions sont en corrélation avec leurs déclarations.
Une simple analyse de texte permettrait de commencer à y voir plus clair. Lallab déclare être areligieuse, aconfessionnelle et apartisane, tout comme le CCIF (idéologiquement la branche juridique des Frères musulmans en France) qui déclare aussi être apolitique, areligieux et défendant les Droits de l’Homme.
Comme avec le CCIF et l'ensemble des islamistes, Lallab racialise les musulmanes. On extrapole le religieux pour en faire une ethnie.
Ces deux mouvements déclarent les mêmes choses et montrent les mêmes contradictions. Car Lallab déclare en même temps que son objet est de défendre les femmes musulmanes. Comme avec le CCIF, les musulmanes sont ici racialisées. On extrapole le religieux pour en faire une ethnie. Ce qui justifierait le côté "areligieux" et légitimerait les accusations de racisme. C'est la stratégie des Frères musulmans. Toujours relevant de la même idéologie, Lallab ne parle pas du droit des intégristes musulmans, ni même des musulmanes voilées. Elle parle des "femmes musulmanes". L'interprétation religieuse radicale de Lallab doit être perçue comme étant l'islam de l'ensemble des musulmanes. Ainsi, toute critique pourra être dénoncée comme une attaque envers les musulmanes en général. Encore la stratégie frériste… Rappelons que le voile est prescrit non pas par l'islam mais par l'interprétation religieuse des intégristes musulmans. Toutes les justifications du voile sont faites par des théologiens et islamologues Frères musulmans ou salafistes (ainsi que d'autres courants extrémistes minoritaires) plus sexistes et rétrogrades les uns que les autres. Aucun islamologue rationaliste ne considère le voile comme une prescription religieuse. Ce vêtement existe uniquement pour des raisons sexistes : cacher le corps des femmes pour ne pas exciter la libido des hommes. Le voile fait partie du système de domination patriarcale. En cela, le port du voile ne peut être brandi par féminisme puisqu'il rejette par essence l'égalité des sexes. Le hijab étant l'uniforme des Frères musulmans, les militantes voilées de Lallab revendiquent par le vêtement leur filiation idéologique tout en essayant de s'en dédouaner pour se dédiaboliser. Pour les musulmanes ratinoalistes/progressistes, la piété ne se mesure pas au centimètre carré d'un tissu cachant leurs cheveux et leur corps censés être source de tensions. Ce qui, pour une association revendiquant son féminisme, est déjà le premier problème.
Le port du voile ne peut pas être brandi par féminisme puisqu'il rejette par essence l'égalité des sexes.
Face aux premières critiques, Lallab a précisé que les femmes musulmanes ne sont pas homogènes. Mais elle continue de parler au nom des femmes musulmanes…
Sur son site internet, toujours pour son côté "areligieux et aconfessionnel", nous trouvons plusieurs articles sur le ramadan, la prière, la conversion à l'islam, "le romantisme du Prophète Muhammad", etc. Tout comme le FN lorsqu'il s'agit des manifestations catholiques, Lallab considère-t-elle que ces articles relèvent d'une simple pratique culturelle ? Il n'y a aucun mal à affirmer ses convictions religieuses sur son site internet. Bien au contraire, c'est une liberté permise par notre démocratie à travers la laïcité. Si Lallab se présentait comme une association religieuse défendant la radicalité de son interprétation des textes coraniques, ce serait cohérent et il n'y aurait pas grand-chose à en dire sur ce thème. Le problème est que cette association, par le décalage entre ses déclarations et ses actes, veut se faire passer pour ce qu’elle n’est pas.
Une des multiples déclarations mensongères des militantes de Lallab qui suffisent à convaincre les relativistes.
Plus généralement, la quasi-totalité des articles et des actions de cette association "areligieuse, aconfessionnelle et apartisane" sont en rapport avec l'islam à travers la défense des (intégristes) musulmanes.
Une association qui se dit "féministe" écrirait des articles et mènerait des actions touchant l'ensemble des femmes. Là encore, à part une action "vitrine" sur le cyber harcèlement, et peut-être une ou deux autres, c'est le néant.
Idem pour les luttes féministes en rapport avec le corps. Quels sont les articles et actions menées par Lallab pour l'autonomie sexuelle des femmes ? Y-a-t-il eu une action de prévention, d'éducation à la sexualité en direction des adolescentes, en particulier musulmanes (puisque son côté "areligieux" s'adresse spécifiquement à elles) ? Lallab a-t-elle créé des outils permettant aux femmes, et aux jeunes musulmanes en particulier, de libérer la parole sur leur sexualité et leur difficulté à l'assumer par rapport aux garçons ? A-t-elle déconstruit le mythe de la virginité au mariage, phénomène qui cause tant de dégâts chez de nombreuses musulmanes ? A-t-elle au moins défendu et argumenté sur le fait que des interprétations religieuses ne reconnaissent pas le voile comme une obligation ?
Là encore, il n'y a rien de cela. Pourtant, c'est en menant des actions de ce type, en leur fournissant tous les outils de connaissance et d'émancipation, que Lallab pourrait réellement donner le choix aux musulmanes d'être conservatrices ou non et permettre à chacune de se construire selon ses propres envies et ses approches personnelles de la foi.
Les écrits de l'association sur la mixité et la sexualité se limitent à la "pudeur", à la mode sexiste (ce que les intégristes appellent la "mode pudique") et à l'acceptation de la non-mixité.
Lorsque la mode pour les "musulmanes" est abordée, c'est uniquement sous l'angle de la pudeur. Les musulmanes qui ne s'y reconnaissent pas, qui aiment au contraire les jupes courtes et les décolletés ? Elle n'en parle pas. Puisque leur islam recommande le sexisme (pardon, la "pudeur"), les désirs vestimentaires des autres musulmanes ne méritent pas d'être cités. La "mode pudique" concerne les femmes "à la recherche de pudeur, de retenue et de modestie", comme elle l'explique dans un de ses articles (3). Et les femmes qui préfèrent une autre mode ? Elles sont moins pudiques, manquent de retenue et de modestie… C'est d'ailleurs uniquement là qu'elle aborde succinctement la sexualité : l’idée principale [de la mode pudique] réside dans la réappropriation de la mode par celle-ci tant que les vêtements portés n’incitent pas à une attirance sexuelle. La mode non "pudique" attirerait sexuellement. Si une femme s'habille avec des vêtements sexy, peut-être qu'en cas d'agression les "féministes" de Lallab lui conseilleront de se vêtir de façon plus couverte au lieu d'apprendre aux hommes à mieux respecter les femmes ? Voilà comment, sur un critère moralement sexiste, dicter aux femmes leur façon de se vêtir, tout en accusant autrui de leur dicter comment s'habiller à la moindre critique du voilement...
Quant à la mixité, Lallab nous explique, dans ses "3 conseils pour assumer son féminisme" (4), que "être féministe ne signifie pas forcément être à l’aise dans un environnement masculin et vous ne devez pas avoir honte de ne pas toujours vous sentir à votre place." Cela ne doit pas vous surprendre. C'est un des aspects du "féminisme islamique".
La "pudeur" appliquée à la mode est un critère moral subjectif, motivé par le sexisme, choisi par les islamistes hommes qui en ont eux-mêmes défini les contours. Cette "mode pudique", qui passe par le voilement, a ainsi pour fonction de dicter aux femmes la bonne façon de se vêtir. La rhétorique d'inversion permet d'accuser toute critique de ce sexisme de vouloir dicter aux femmes la bonne façon de se vêtir.
J'ai eu beau chercher, je n'ai trouvé aucun article de Lallab racontant le parcours d'une musulmane qui aurait quitté l'islam, ou bien à quel point une musulmane s'est sentie libérée de ne plus faire le ramadan ou la prière, ou encore la libération d'une autre d'avoir retiré son voile, ou bien le calvaire d'une telle qui subit des pressions pour cacher ses cheveux. Une association "areligieuse et aconfessionnelle" qui prétend également défendre les droits des femmes musulmanes (et pas seulement de la frange extrémiste), aurait publié ce type d'articles et de témoignages concernant des musulmanes victimes de harcèlement et de discrimination de la part de leurs coreligionnaires. Combien sont-elles à avoir besoin d'une association défendant réellement les musulmanes et pas uniquement les intégristes ? Lallab, tout comme le CCIF, peut voler au secours d'une femme voilée, mais ne regardera pas les musulmanes qui se battent pour ne plus l'être.
Avec tout cela, il n'y a alors rien d'étonnant à ce qu'une majorité des photos de son site montre uniquement des musulmanes voilées. Lallab tente par tous les moyens de faire passer le port du voile, accessoire textile le plus sexiste que l'homme ait jamais inventé, pour du féminisme. Ceci pour contribuer au projet intégriste d'associer la musulmane au voile dans l'inconscient collectif.
Et que dire de son approche raciale du féminisme, si proche des Indigènes de la République, par son rejet de l'universalisme à travers son slogan "Remballe ton féminisme blanc". Cela doit être son côté "apartisan" et humaniste je suppose...
Lallab tente par tous les moyens de faire passer le port du voile, accessoire textile le plus sexiste que l'homme ait jamais inventé, pour du féminisme.
Mais comme il suffit de croire les islamistes sur parole, alors peu importe les faits, seules leurs déclarations comptent. Pourquoi Libération ou Médiapart n'appliquent-ils pas cette méthode relativiste au FN ?
En résumé, le féminisme de Lallab se résume à "Touche pas à mon intégrisme". Une question légitime se pose : pourquoi toutes ces contradictions, entre les déclarations et la réalité, de cette association n'ont-elles pas titillé la curiosité des journalistes de Libération ?
Lallab déclare être féministe, areligieuse, aconfessionnelle et apartisane, alors faisons comme Libération et ses soutiens relativistes : croyons-la sur parole…
(1) Stop au cyberharcèlement islamophobe contre l'association Lallab
(2) L'agence du service civique suspend une annonce accusée d'«islamisme»
(3) 5 idées reçues sur la « modest fashion »
(4) 3 conseils pour assumer son féminisme